mercredi 26 septembre 2018

#MeToo



Me Too

CVUH
 
 « Me too/balance ton porc » ne cessent de défrayer la chronique. Les féministes, toutes tendances confondues, sont sommées, chaque jour, d’éclairer une actualité de ce avènement à la fois récurrent et inédit que d’aucuns souhaiteraient limiter aux affaires scandaleuses que révèlent la presse.  Or répondre aux questions des journalistes avant tout soucieux de la durée du « phénomène », semble difficile tant le regard de ces derniers reste rivé aux premiers plans de l’actualité. La déclinaison historique des revendications des femmes, la complexité des paroles, la dimension politique d’une prise de conscience lente mais irréversible, étonnent et agacent les gens pressés. On le sait désormais, l’événement immédiat efface le précédent au rythme des échanges sur les réseaux sociaux. On ignore ou on a oublié que le mouvement critique à l’encontre du harcèlement dans les transports publics, les entreprises, les magasins, les ateliers, dans le huis clos de la chambre à coucher n’a cessé d’être mis en cause depuis plus de deux siècles. Les mouvements féministes, trop souvent seuls, ont organisé en France et ailleurs nombre de manifestations contre le viol et le meurtre de femmes battues, sans soutien. Mais Hollywood fascine et le comportement prédateur de hautes autorités masculines jusqu’alors intouchables devient inadmissible, mais il n’en reste pas moins qu’il demeure encore dans la sphère du scandale si l’on en juge par les commentaires.
Oui le mouvement est irréversible, oui chacune, individuellement et collectivement, est décidée à ne plus accepter de voir son corps réduit à une chose convoitée, oui désormais on sait que « céder n’est pas consentir ». Mais la dénonciation du corps marchandise ne se limite pas à celle du harcèlement sexuel au quotidien. Dans le monde entier des femmes ont protesté et protestent pour bien d’autres raisons et contre bien d’autres prédateurs. Pourquoi la presse ne s’interroge-t-elle pas, ne nous interroge-t-elle pas, sur l’impact des prises de positions extrêmement courageuses des femmes russes emprisonnées pour avoir critiqué Poutine ? Pourquoi ne fait-on pas le lien entre le mouvement de femmes ukrainiennes, celui des Pussy riot, et la conquête progressive des femmes d’un espace public qui leur fut longtemps interdit ? Pourquoi n’a-t-on pas rendu compte largement de ce grand mouvement d’étudiantes et de professeurs chiliennes, manifestant seins nus sur les campus et ailleurs, qui commença en avril dernier à l’université de Valdivia à Santiago ? Pourquoi ne s’attache-t-on pas aux difficultés des féministes indiennes contraintes de faire face à l’élection de Narendra Modi pour aller au-delà de la lutte contre les violences sexuelles ? Comme si la presse voulait limiter le mouvement au « sexe », perpétuant leur image de reproductrice et d’objet sexuel construite par les hommes depuis des siècles, ignorant tout mouvement politique. Or, ces actions individuelles et collectives sont issues d’une très longue histoire ; toujours discontinues, elles s’insèrent dans le débat public de manière inattendue. Aujourd’hui le mouvement est présent dans l’espace public ; il est politique à bien des égards. Une fois encore, les femmes réclament leur place dans tous les espaces en tant qu’individu.e.s à part entière qui pensent et agissent en toute conscience et défendent non seulement l’intégrité de leur personne mais soutiennent un point de vue critique à l’égard de l’organisation des sociétés fondée sur la domination. Et s’insurgent, par exemple, contre le retour du religieux dans les pays de l’Europe de l’est.
La longue histoire que l’on voudrait réduire à une histoire des femmes dominées est au contraire balisée par des moments d’exceptionnelle liberté, partout en Occident et ailleurs. Malgré la censure, les quolibets, les humiliations, des femmes se sont soulevées contre le sort qui leur était réservé. Qui se souvient des combats de Claire Lacombe pendant la Révolution française, de Jeanne Deroin en 1848 ou d’Hubertine Auclert à la fin du XIXe siècle, pour ne parler que de la France ?
Laissées en marge des institutions politiques, privées de droits, écartées de débats, les femmes – en nombre ou singulièrement – n’ont cessé de lier leur condition à leur mise à l’écart du politique que les autorités masculines voudraient pérenniser. « Le privé est politique », écrivaient-elles en 1970, c’est précisément ce slogan qui est remis sur le devant de la scène. Ne nous méprenons-pas : la logique d’une telle prise de conscience collective, à l’échelle mondiale, devrait conduire à la critique des dominations sous toutes leurs formes. Mais sans doute est-ce encore une utopie ? Bien réelle, cependant, tout comme le féminisme l’était et le demeure !
Michèle Riot-Sarcey, pour le CVUH

lundi 17 septembre 2018

Journée d’étude: Le CVUH et les usages publics de l’histoire, 20 octobre 2018


Journée d’étude
Le CVUH et les usages publics de l’histoire
20 octobre 2018, 14h-17h

Centre Malher – Amphi Dupuis
9 rue Malher, 75004 Paris


Programme

Introduction
Anne Jollet, vice-présidente du CVUH, Université de Poitiers
14h-14h20

Les politiques de mémoire, nouveau paradigme international
Sébastien Ledoux, Université Paris I, 14h20-14h40
Discussion/débat avec la salle, 14h40-14h55

Écriture de l’histoire et air du temps (Zeitgeist), la double instrumentalisation de l’antifascisme en Allemagne
Sonia Combe, centre Marc Bloch, Berlin, 14h55-15h15
Discussion/débat avec la salle, 15h15-15h30

Pause 15h30-15h50

Usages publics de l’histoire et engagement au Québec et au Canada
Laurent Colantonio, Université du Québec à Montréal, 15h50-16h10
Discussion/débat avec la salle, 16h10-16h25

Le CVUH, l’histoire enseignée et ses finalités
Olivier Le Trocquer, Université Paris 1, 16h25-16h45
Discussion/débat avec la salle, 16h45-17h