Cet
article a d’abord été publié sur le blog de Gilles Manceron, le 1er
février 2021 : https://blogs.mediapart.fr/gilles-manceron/blog/010221/s-appuyer-sur-le-rapport-de-benjamin-stora
La remise du rapport Stora sur les mémoires de la
colonisation et la guerre d’Algérie a suscité des réactions diverses, souvent
hâtives, qui confirment surtout la présence lourde du passé franco-algérien
dans le présent des deux pays. Davantage que de s’attarder sur les reproches ou
soupçons exprimés ça et là, il s’agit de se demander quel avenir il pourrait
ouvrir si des citoyens s’en emparent.
Constatons d’abord
que la remise de ce rapport a eu lieu dans des conditions quelque peu cocasses.
Elle était annoncée sur l’agenda de l’Elysée pour le jeudi 20 janvier à 17h,
mais quand l’auteur du rapport s’est présenté à l’heure dite pour le remettre
au président, les journalistes auxquels il aurait pu, ainsi qu’Emmanuel Macron,
adresser quelques mots sur le sujet brillaient par leur absence. C'est que,
dans la matinée, ceux-ci avaient été convoqués par le « conseiller mémoire » de
la Présidence, Bruno Roger-Petit, qui leur avait livré des « éléments de
langage », lesquels ont été largement diffusés dès la mi-journée par
l’Agence France Presse, les quotidiens en ligne et les chaines d’information
continue. C’est ainsi que les journaux français et étrangers se sont fait
l’écho de ce verdict péremptoire : « Colonisation et guerre d'Algérie : Il n’y aura “pas d’excuses”, prévient
l’Élysée ».
L’invention du terme de « repentance »
Comment ne pas s’inquiéter de cette sentence
catégorique. Immédiatement reprise par la presse française et algérienne
par des personnes qui n’avaient pas eu le temps de lire ce rapport de près de
200 pages (dans la version qui va paraître chez Albin Michel) qui commençait à
peine à circuler par des voies autres que le site de l’Elysée. Quelques
lecteurs, pourtant, dans les deux pays, ont émis des réactions intéressées.
Quant au haut fonctionnaire chargé en Algérie de ce dossier « sous
l’autorité » du président Tebboune — son conseiller Abdelmadjid Chikhi,
ex-conseiller de Bouteflika et bien connu pour être le gardien sourcilleux des
archives nationales algériennes —, il a eu le toupet de dire, quand la
presse algérienne l’interrogeait sur son silence, qu’il ne l’avait pas lu, car
il ne l’avait pas reçu officiellement. On en est presque revenu à l’époque où
les dirigeants soviétiques des débuts de la déstalinisation niaient
l’authenticité du rapport présenté par Khrouchtchev au XXe congrès dont le
texte circulait dans le monde entier, parlant de lui comme du rapport
« attribué au camarade Khrouchtchev ».
C’est donc la formule « ni
excuses, ni repentance », avant même sa remise et même si on ne la trouve
pas dans le rapport, qui s’est trouvée accolée au rapport Stora.
Le choix du mot
« repentance » n’est pas innocent. Il a été utilisé par Nicolas
Sarkozy lors de sa campagne pour l’élection présidentielle de 2007. Avec un but
précis : attirer des voix d’extrême droite pour éviter une présence de
celle-ci au second tour et refuser toute reconnaissance lucide du fait que la
colonisation de l’Algérie contredisait toutes les idées des droits de l’homme.
Celles des Encyclopédistes et de la Révolution française en faveur de la
liberté des peuples à ne pas être objet de conquête, et même, le cas échéant,
d’y résister. Il s'agissait d'empêcher de reconnaître que la colonisation
contredisait le principe de l’égalité de tous les êtres humains proclamé sous
la Ire République lors de la Révolution française (1). Et que la
« République coloniale » avait été une effroyable négation des
principes humanistes et universels dans l’histoire des IIIe, IVe et
VeRépublique.
Destiné à faire obstacle à cette
reconnaissance, la « repentance » est un concept écran, inventé, non
par des Algériens, mais par des Français nostalgiques de la colonisation pour
discréditer les demandes de qualifier pour ce qu’elles sont les injustices et
les violences coloniales qui furent souvent des crimes contre l'humanité (comme
l'avait d'ailleurs reconnu Emmanuel Macron en février 2017). Un
concept repris comme un épouvantail par quelques auteurs comme Pascal
Bruckner ou Daniel Lefeuvre (2). Ou encore l’historien Guy Pervillé (3)
aux travaux importants mais qui est proche des milieux
« nostalgériques », et qui, par exemple, lors du procès de Bordeaux
qui a condamné Maurice Papon pour complicité de crime contre l’humanité en
Gironde en 1942, s’était adressé à l’AFP en 1997 pour réfuter le témoignage de
Jean-Luc Einaudi sur la répression sanglante en octobre 1961 orchestrée par ce
même Papon devenu préfet de police du département de la Seine.
L’impossible « grand écart » de Jacques Chirac
Contrairement à ce que dit Pervillé (4), le gouvernement
algérien n’a jamais utilisé ce mot de « repentance ». La Fondation du
8 mai 45, qui s’attache à commémorer la répression sanglante des
manifestations de mai et juin1945 dans le Constantinois, créée en mai
1990 à Kherrata par Bachir Boumaza et présidée ensuite par Mohamed El Korso et
Abdelhamid Selakdji, aux initiatives auxquelles j’ai plusieurs fois participé comme historien à Sétif et
Guelma, a pour revendication principale la reconnaissance par la France de ses crimes coloniaux en
Algérie. Si elle s’est élevée légitimement contre la création en 2010 par
Nicolas Sarkozy et son secrétaire d’État à la Défense et aux Anciens
combattants Hubert Falco d’une Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie
sur la base de la loi du 23 février 2005 enjoignant les enseignant à montrer les
« aspects positifs de la colonisation » (5), elle s’est placée,
quelles que soient ses demandes, sur le terrain de l’histoire et du droit,
refusant « la tentation d’agir dans un esprit vindicatif ou
revanchard » (6). Il est inexact de dire que « la revendication de repentance à Alger a
fait échouer le traité d’amitié » qu’espérait Jacques Chirac (7).
En réalité, c’est le « grand écart » tenté par lui entre ce projet de
traité et la loi sur les « aspects positifs de la colonisation »
— qui résultait d’une promesse faite en 2002 au lobby
« nostalgériste » pour le dissuader de voter Le Pen au second tour de
la présidentielle —, qui a conduit à son échec, puisque l’inscription dans
son préambule demandée par l’Algérie des « regrets » de la France pour « les torts portés à l’Algérie durant
la période coloniale » ne pouvait se concilier avec son appui à
la vision « civilisatrice » de la colonisation. Son refus de la reconnaissance a
rendu vains les quelques gestes de compassion qu’il avait faits durant son quinquennat
et a préparé l’orientation encore plus négative de Nicolas Sarkozy qui a brandi
la formule du « refus de la repentance ».
Le nécessité absolue de la reconnaissance
Depuis ces atermoiements de la
présidence de Jacques Chirac, les choses se sont nettement aggravées dans la
société française. Une régression s’est produite sur la question coloniale, le
débat sur cette page du passé de la France s’est éloigné davantage au
XXIe siècle de la référence aux droits universels de l’homme.
Les quatre dernières décennies du
XXe siècle ont été marquées par l’extrême pusillanimité sur ce sujet des
présidents successifs de la Ve République. Le général de Gaulle, après
avoir fait le choix d’accepter l’indépendance de l’Algérie, qui l’a confronté à
la défection au sein de ses soutiens de 1958 des jusqu’au-boutistes de
l’Algérie française, a accepté, en juin 1968, que l'amnistie s'applique à
tous les actes des putschistes de 1961 et des criminels de l’OAS. Il a cherché
à détourner les Français de cette page de notre histoire en ravivant la mémoire
de la Résistance incarnée par Jean Moulin et les martyrs du Mont Valérien.
Georges Pompidou a voulu faire oublier les temps où « les Français ne
s’aimaient pas ». Valéry Giscard d’Estaing a réintégré dans sa majorité
une partie de la droite antigaulliste qui n’avait pas accepté l’indépendance de
l’Algérie. François Mitterrand, devenu président, s’est tenu à l’écart de la
mémoire de cette très meurtrière décolonisation, ayant été un adversaire
farouche du mouvement national algérien comme ministre de l’intérieur
en 1954 comme des premières indépendances africaines, et, avant de
soutenir l’abolition de la peine de mort en 1981, il l’avait préconisée
abondamment comme ministre de la Justice du gouvernement Guy Mollet. Quant à François
Hollande, il n’a fait sur ce sujet – malgré les conseils de Benjamin Stora –
que de petits gestes trop timides. Dans ces conditions, aucune déconstruction
des mythes qui justifiaient l’empire colonial n’est intervenue et l’extrême
droite qui les cultive comme une rente a eu beau jeu d’étendre son influence.
Il faut dire que la gauche française est extrêmement
gênée par la page coloniale de notre histoire, et cela a pour elle des
racines profondes. Sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), le mouvement
socialiste naissant a majoritairement regardé avec faveur l’expansion
coloniale. C’est la IIe République (1848-1852) qui a fait des territoires
de l’Algérie des départements français soumis à des lois particulières. Et une
personnalité comme Jaurès qui a évolué de 1908 à 1914 vers un anticolonialisme
résolu (8), n’a pas été suivi sur ce sujet par la majorité de ses
camarades. A la fin du XIXe siècle, la gauche républicaine s’est ralliée à
l’idée d’empire, et, au XXe siècle, pour que la branche du mouvement
socialiste devenue le PCF adopte, à certains moments de son histoire, une
orientation fermement anticolonialiste, il a fallu de fortes pressions de
l’Internationale communiste.
La déclaration d’Emmanuel Macron
sur la colonisation comme « crime
contre l’humanité », avant son élection, sa déclaration importante de septembre
2018 en rendant visite à la veuve de Maurice Audin, reconnaissant que
son mari a été assassiné par les militaires français qui le détenaient, dans le
cadre d’une pratique généralisée de la torture et des détentions arbitraires,
dépassaient largement en audace ce qu’ont dit les responsables de la gauche
depuis la fin de la guerre d’Algérie. D'où l'étonnement que suscite la prudence
de sa lettre de mission à Benjamin Stora, qui apparaît clairement
comme un recul politique face aux effets politiques régressifs consécutifs au «
moment 2000 ».
La régression récente de la société française
L’entrée dans le XXIe siècle a
été marquée, en effet, par une soudaine mais éphémère prise de conscience. Il y
a eu un « moment 2000 », où après les articles de Florence Beaugé en
juin dans Le Monde, suivis de
« l’Appel des douze » publié dans l’Humanité en octobre, la question de la torture pratiquée par
l’armée française dans la guerre d’Algérie, paroxysme et emblème de la violence
coloniale, est revenue quelque temps sur le
devant de la scène. Cela a coïncidé avec un essor des travaux de recherches sur
ces sujets à l’université, dont la thèse de Raphaëlle Branche, soutenue en
décembre, sur la torture pratiquée par l’armée française dans la guerre
d’Algérie (9). Il a perduré plusieurs années et été marqué par des
événements importants : l’inauguration par le maire de Paris, Bertrand
Delanoë, en 2001 d’une plaque au Pont Saint-Michel commémorant le massacre du
17 octobre 1961, puis d’une Place Maurice Audin en 2004, et enfin le 11
octobre 2011 d’une stèle à la mémoire des victimes françaises et algériennes de
l’OAS, qui ont coïncidé avec la reconnaissance par la presse des travaux
de Jean-Luc Einaudi, après le fiasco de la plainte en diffamation de Maurice
Papon contre lui en mars 1999 pour ce qu’il avait écrit dans Le Monde sur le massacre des
Algériens quand il était préfet de police.
Mais ces années ont été aussi celles
de la consolidation du Front national, de la présence de Jean-Marie Le Pen en
mai 2002 au second tour de l’élection présidentielle et des gages donnés par
Jacques Chirac aux milieux nostalgiques de la colonisation (avec la promesse
d’un monument aux morts de la guerre d’Algérie au Quai Branly, inauguré en
décembre 2002, et d’une loi sur les « aspects positifs de la colonisation
» votée en février en 2005) pour les dissuader de voter Le Pen au second tour.
La suite de son quinquennat a été marquée par des gestes contradictoires et des
tergiversations ont fini par ouvrir la voie à l’élection de Nicolas Sarkozy,
avec son « refus de la repentance » et son discours de Dakar sur les
Africains qui « ne sont pas entrés dans l’histoire ».
Mais cela a été combattu dans la
première décennie du XXIe siècle. La loi de 2005 a été largement
dénoncée, par exemple par Le Monde, ce qui a conduit à un épisode unique dans l’histoire de la
République : le retrait d’un article d’une loi signée par le président et
publiée au Journal officiel. Et
au lendemain de l’élection de Nicolas Sarkozy, un texte a été publié dans ce
quotidien à l’initiative de l’historien Gilbert Meynier et du
militant de la Ligue des droits de l’Homme de Toulon, François Nadiras,
intitulé « France Algérie : dépasser le contentieux
historique », signé largement des deux côtés de la
Méditerranée, notamment par Benjamin Stora, Simone de Bollardière, Edgar Morin,
Christiane Taubira, Jack Ralite, Yvette Roudy, Raphaëlle Branche, Malika Rahal
et Sylvie Thénault, et, en Algérie, Hocine Aït-Ahmed, Mohammed Harbi, Ali
Haroun et Abdelhamid Mehri. Diffusé par la LDH et porté par le site ldh-toulon, sa conclusion est claire et
toujours actuelle : « Dépasser le contentieux franco-algérien
implique une décision politique, qui ne peut relever du terme religieux de
“repentance”. Et des “excuses officielles” seraient dérisoires. Nous demandons
donc aux plus hautes autorités de la République française de reconnaître
publiquement l’implication première et essentielle de la France dans les
traumatismes engendrés par la colonisation en Algérie. Une reconnaissance
nécessaire pour faire advenir une ère d’échanges et de dialogue entre les deux
rives, et, au-delà, entre la France et les nations indépendantes issues de son
ancien empire colonial ». Il date de novembre 2007 et a été salué, par
exemple, comme une « intelligente pétition » par le quotidien Libération. Ce qui permet de mesurer, au vu
de la réaction de l’Elysée à la remise du rapport Stora, combien, depuis cette
date, les termes du débat ont régressé en France dans la deuxième décennie du
XXIe siècle.
Benjamin Stora semble avoir décidé de
renoncer, compte tenu des régressions qui se sont produites dans la société
française, à réitérer avec force cette demande de reconnaissance
« première et essentielle ». Compte tenu également du positionnement
timide d’Emmanuel Macron qui n’a pas réitéré en tant que président ses propos tenus en Algérie avant son
élection, et du fait qu’il répondait à une commande du pouvoir visant à
« rassembler les mémoires françaises ». Mais cette demande de
reconnaissance, si elle n’est pas assénée plus fortement au cœur de son
rapport, est implicite dans son contenu. Le rapport admet qu’il faudra que
les plus hautes autorités de la France en viennent à formuler des excuses
pour ce qui a été commis au nom de la France. Certains commentateurs
inattendus, comme le journaliste Jean-Michel Apathie, l'ont d'ailleurs affirmé avec force. L’important aujourd’hui est
de faire avancer dans l’opinion l’idée qu’il faut un travail de vérité sur
les réalités coloniales et le rapport Stora peut y aider.
Plutôt que d’exprimer certaines idées
auxquelles il est personnellement attaché mais qui n’auraient aucune chance
d’être retenues dans le contexte politique actuel de la France, Benjamin Stora
a recherché ce qui pourrait être efficace. Sa démarche pragmatique ne mérite
pas d’être discréditée. Elle mérite d’être soutenue en ajoutant d’autres
préconisations.
Se tourner vers l’avenir
C’est dans cette optique que l’Association Josette et Maurice Audin qui continue le combat
du Comité Audin, animé de 1957 à 1963 par les universitaires Laurent Schwartz
et Pierre Vidal-Naquet, y a réagi par une contribution tournée résolument
vers l’avenir des deux pays. Elle qui a pour objectif d’établir la vérité sur
les circonstances de l’assassinat de Maurice Audin en 1957, a inauguré en 2019
un cénotaphe au cimetière du Père-Lachaise, seul monument en France pour un
combattant de l’indépendance algérienne, et, depuis, le 11 juin, date de la
« disparition » de Maurice Audin, elle y organise un rassemblement.
En 2021, un représentant de la République française au plus haut niveau y
serait bienvenu.
Sur la question des personnes
« disparues » comme Maurice Audin entre les mains des forces de
l’ordre françaises dans la guerre d’Algérie, elle a soutenu la mise en place du
site 1000autres.org qui fait appel à des
témoignages sur le sort de plus d’un millier de personnes qui en ont été
victimes. Cela lui a permis d’identifier à ce jour, grâce aux archives et aux
familles, 320 disparus dont les corps restent introuvables.
En septembre 2019, cette association
a co-organisé à l’Assemblée nationale une journée d’étude rassemblant des
historiens, des archivistes et des juristes, consacrée à cette question et
diffusé en ligne l’intégralité des débats. L’idée y a été émise d’un
recours devant le Conseil d’Etat pour obtenir la levée des entraves à l’accès à
certaines archives concernant notamment ces disparitions. En effet, bien qu’une
communication « de plein droit » découle
de la loi en vigueur pour accéder aux archives de plus de 50 ans, une
instruction interministérielle rend obligatoire une procédure de
déclassification préalable pour tous les documents munis de tampon
« secret », abondamment apposés par l’armée française en Algérie.
L’effet de ce texte absurde est d’interrompre brutalement des centaines de
travaux de recherche. Ce sont des décennies de notre histoire qui sont
désormais soumises au bon vouloir et aux faibles moyens humains des
administrations, alors que la loi les rend librement communicables s’ils sont
antérieurs à 1970. Cela contredit la promesse du président de la République
lors de sa visite à Josette Audin le 13 septembre 2018 d’une ouverture des
archives de la guerre d’Algérie. Cette situation soulève une vives protestations d’historiens français
et étrangers, d’archivistes et de citoyens. Un recours au Conseil d’Etat a été
déposé. Le rapport de Benjamin Stora mentionne cette démarche.
D’autres propositions peuvent
s’inscrire dans sa lignée. La venue en France de chercheurs algériens pour
consulter les archives françaises doit être facilitée. Le travail du site 1000autres.org doit être reconnu et aidé par
les autorités publiques et une collaboration entamée avec les équipes des
Archives nationales qui ont commencé à travailler à un Guide des disparus. Le
prix de mathématiques Maurice Audin, reprenant l’initiative du mathématicien
Laurent Schwartz, qui est attribué à des mathématiciens algériens et français,
dont le jury est composé de mathématiciens de renom, algériens et français,
certains titulaires de la médaille Fields (Cédric Villani, Ngô Bảo Châu),
soutenu en Algérie par la direction et le ministère de la recherche
scientifique et en France par l’Institut Henri Poincaré et les sociétés de
mathématiques, mérite d’être mieux connu et valorisé. Des moyens financiers
durables doivent permettre de le pérenniser. Les chaires de mathématiques
Maurice Audin qui sont en cours de création dans les deux pays doivent
également être mieux encouragées.
La population algérienne réclame avec
son hirak de se
réapproprier son histoire. Un rapprochement des peuples algériens et français
ne passe pas par des commissions opaques rassemblant dans le secret des hauts
fonctionnaires français et des représentants des militaires au pouvoir en
Algérie. Il passe par des échanges, réguliers et soutenus, dans de nombreux
domaines, culturel, scientifique, sportif, entre les citoyens. De multiples
pistes peuvent être avancées en s’appuyant sur le rapport de Benjamin Stora,
sans pour autant se faire la moindre illusion sur la réalité des multiples
contraintes d'Etat qui ont limité son expression.
Gilles Manceron
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(1) Gilles Manceron, Marianne et les colonies, La
Découverte/Ligue des droits de l’homme, 2003.
(2) Pascal Bruckner, La Tyrannie de la pénitence : Essai sur
le masochisme Occidental, Grasset, 2006 ; Daniel Lefeuvre, Pour en finir avec la repentance coloniale,
Flammarion, 2008.
(3) Guy Pervillé, Histoire iconoclaste de la guerre d'Algérie
et de sa mémoire, Vendémiaire, 2018.
(4) Entretien avec Frédéric Bobin publié
dans Le Monde le 22 janvier 2020.
(5) Algeria-Watch, 29 septembre 2009, « Fondation sur la guerre d’Algérie
: La fondation 8 Mai 45 réagit ». Voir Ligue des droits de l’homme.
(6) Voir par exemple, La Dépêche de Kabylie, 7 mars 2005 : « Loin de la
Fondation du 8-Mai 1945, la tentation d’agir dans un esprit vindicatif ou
revanchard. Cependant, il importe beaucoup pour le peuple algérien que la
France officielle se décide enfin à reconnaître son implication dans les actes
monstrueux et inhumains commis en son nom de 1830 à 1962 ».
(7) Entretien cité.
(8) Jean Jaurès. Vers l’anticolonialisme, Textes réunis et
présentés par Gilles Manceron, Les petits matins, 2015. Voir Ligue des droits de l'homme.
(9) Raphaëlle Branche, La torture et l’armée pendant la guerre
d’Algérie, Gallimard, 2001.