Le Manifeste du CVUH

samedi 13 avril 2013

Enjeux d’une écriture historienne du devoir de mémoire (1) par Sébastien Ledoux.




(1) Ce texte est une version modifiée de l’article « Écrire une histoire du devoir de mémoire », paru dans la revue Le Débat (170), mai-aout 2012, p. 175-185.





Écrire aujourd’hui une histoire du devoir de mémoire revient à questionner la production et la circulation d’une nouvelle formule, entrée en France dans le vocabulaire courant, comme dans le langage officiel, depuis les années 1990[2]. Un tel projet scientifique suppose de prendre au sérieux cette formule, devenue un lieu commun largement décrié, en interrogeant ses fonctions sociales de manière à en faire un véritable objet d’histoire.

Partons du champ disciplinaire auquel se rattache cet objet. La discipline historique s’est trouvée concernée de très près par l’expression devoir de mémoire. L’aspect le plus visible de cette relation a constitué une dispute, au sens étymologique du terme, engageant nombre d’historiens qui ont, à cette occasion, débattu publiquement de leur rôle social, de leur identité comme de l’épistémologie de leur discipline. L’objet d’étude mobilisé n’est donc pas neutre, loin s’en faut, dans le milieu même où il est étudié.
Dans un souci de distinction, de multiples historiens ont pris position contre l’expression devoir de mémoire au cours de ces quinze dernières années : d’Henry Rousso qui fustige dès 1994 une « injonction à la mode[3] » à Annette Wieviorka, récemment, pour qui cette expression « ne recouvre rien du tout, car la mémoire n’est pas un devoir[4] ». Elle est utilisée aussi bien comme une contre-référence qui permet aux historiens d’affirmer la vocation scientifique de leur identité professionnelle. L’action juridique d’associations menée à l’encontre d’historiens pour contestation de crimes contre l’humanité, tels Bernard Lewis en 1993 au sujet du génocide arménien ou Olivier Pétré-Grenouilleau en 2005 pour les traites négrières, n’a fait que renforcer ce positionnement désormais pourvu d’une expression officielle, avec la création de l’association Liberté pour l’histoire en décembre 2005[5]. Ce lourd « héritage », pour entreprendre une recherche en histoire sur le devoir de mémoire, nécessite une clarification vis-à-vis de son affiliation disciplinaire.
Le problème n’est pas d’opposer ou d’adhérer, mais de considérer les débats publics autour du « devoir de mémoire », comme eux-mêmes objet de recherche. Il ne s’agit pas d’entrer dans une nouvelle discussion sur les méfaits d’une telle injonction pour la société en général, et pour la pratique historienne en particulier qui se serait retrouver « court-circuitée » par l’imposition d’une telle notion. C’est le risque que Paul Ricœur entrevoyait dans l’impératif ainsi formulé, qu’il considérait par ailleurs à la fois comme souhaitable, en tant que porteur d’un « projet de justice », et « lourd d’équivoque[6] ». Une telle recherche ne peut donc relever d’un « devoir d’histoire », expression antonyme apparue sous la plume d’historiens à partir de la seconde moitié des années 1990, et ce en réaction contre les usages alors de plus en plus institutionnels et médiatiques du devoir de mémoire. L’historien Antoine Prost, par exemple, concluait ainsi ses Leçons sur l’histoire en 1996 : « On fait valoir sans cesse le devoir de mémoire : mais rappeler un événement ne sert à rien, même pas à éviter qu’il ne se reproduise, si on ne l’explique pas […]. Si nous voulons être les acteurs responsables de notre propre avenir, nous avons d’abord un devoir d’histoire[7]. » La démarche ne s’inscrit pas non plus dans le prolongement d’une réflexion épistémologique centrée sur la distinction nécessaire entre histoire et mémoire qui a largement dominé la discipline historique depuis trente ans[8]. Écrire une histoire du devoir de mémoire conduit en revanche à relever les pratiques sociales et « une utilisation stratégique[9] » de la mémoire par des historiens, sur une période qui a vu celles-ci considérablement évoluer[10], en partie induites justement par le contexte social d’un « moment-mémoire ». Or, fait a priori paradoxal dans le cadre de cette distinction entre histoire et mémoire de plus en plus revendiquée par les historiens eux-mêmes, leurs travaux se sont développés également dans des dispositifs institutionnels créés en fonction du devoir de mémoire : musées, mémoriaux, commissions (commissions Rémond ou Mattéoli par exemple), commémorations, procès pour crimes contre l’humanité (Touvier en 1994, Papon en 1998). Les historiens ont été aussi des acteurs sociaux engagés, à titre d’experts, dans des processus de valorisation, d’essentialisation et d’institutionnalisation de la mémoire depuis une trentaine d’années. Retracer l’histoire des usages de cette expression invite ainsi à « en finir avec une certaine naïveté du moment-mémoire », comme le suggérait la sociologue Marie-Claire Lavabre dès 1994[11]. Dans le même sens, cette entreprise conduit à relever « l’ambivalence constitutive[12] » du métier d’historien : transmettre des connaissances, mais aussi construire un rapport spécifique au présent et au passé.
Pour autant, il ne saurait être question d’occuper une position surplombante vis-à-vis d’historiens qui, par définition, vivent et pensent leur objet de recherche dans un cadre social donné. Personne ne peut prétendre échapper à un champ d’intelligibilité du passé nécessairement corrélé à un présent agissant sur lui, son activité étant aussi le « symptôme d’une activité subie[13] ». Ainsi, et à rebours d’une position défensive à l’égard de la mémoire tendant à constituer progressivement le socle identitaire des historiens depuis une quinzaine d’années[14], cette évidence permet de préciser la manière dont il convient d’aborder la mémoire, à savoir dans la polysémie et l’historicité de sa terminologie.

Le terme même de mémoire a une histoire dans le discours social qui est indispensable de retracer, du moins dans sa période la plus récente. Ce terme est devenu, par ses multiples usages métaphoriques, une notion particulièrement vague recouvrant des faits extrêmement divers[15]. Surtout, l’investissement de différents acteurs scientifiques, politiques, médiatiques, culturels pour ce terme s’est produit au même moment, soit au tournant des années 1970-1980. Mémoire a ainsi occupé une nouvelle fonction sociale au cours des années 1980 qui tendrait à le situer dans un véritable « horizon d’attente[16] », à l’échelle à la fois individuelle et collective. C’est là le paradoxe apparent de cette nouvelle forme de notre rapport au passé, qui s’est inscrite notamment dans ce mot de mémoire. Le « moment-mémoire[17] » ne signifie donc pas seulement la prééminence d’une notion, mais également le pouvoir d’un mot, l’usage qui en est fait jusqu’à aujourd’hui signalant avant tout un « usage de son pouvoir, de sa puissance d’action, de sa performativité[18] ». Ce mot a donc progressivement constitué une « formation discursive[19] » qui a vu la production de multiples énoncés autour de lui. Citons quelques exemples de ces figures innombrables surgies au cours de cette décennie et appelées à connaître des fortunes diverses : « lieux de mémoire[20] », « chemins de la mémoire », « politique de mémoire », « ministère de la mémoire », « défense de la mémoire », « procès de la mémoire », « assassins de la mémoire », etc. La formule devoir de mémoire s’inscrit donc dans cette longue liste qui traduit, de la part des contemporains, un nouveau rapport au passé. Ce déplacement sémantique témoigne en l’accentuant du caractère essentialisant que la mémoire commence à revêtir au cours de cette période, et qui l’érige en une entité intrinsèque, au même titre que la liberté ou l’égalité, par exemple.
Or, les travaux des sciences sociales et des neurosciences sur la mémoire viennent contredire et déconstruire ce caractère essentialisant véhiculé par le discours social, et repris la plupart du temps par les historiens. Que ce soit en sociologie, en anthropologie, en psychologie ou en neurosciences, ces recherches actuelles constituent un apport précieux pour les historiens travaillant sur la mémoire. Dans les pays anglo-saxons et en Allemagne, les Memory Studies en plein essor privilégient justement une approche transdisciplinaire de la mémoire. Cette école s’est institutionnalisée depuis peu avec la création de différents centres de recherche travaillant spécifiquement sur cet objet : l’Interdisciplinary Memory Group à la New School for Social Research de New-York, le Center for Interdisciplinary Memory Research dirigé par le psychosociologue Harald Welzer à l’institut d’Essen, ou le Center of Memory Studies fondé par le sociologue Andrew Hoskins à l’Université de Warwick[21]. Or, même si chaque discipline énonce des définitions de la mémoire propres à son champ conceptuel, toutes mettent en exergue le rôle fondamental de l’environnement social dans les mécanismes mémoriels, tant individuels que collectifs. Ce point de convergence démontre une fois encore, après les travaux de Maurice Halbwachs dans la première moitié du XXe siècle[22], que la mémoire n’est pas une faculté obéissant à ses lois invariables. Elle est bien au contraire une construction qui s’élabore conjointement par « effet du passé et effet du présent[23] » dans « l’interpénétration des consciences »[24]. La complexité du fonctionnement de la mémoire, individuelle ou collective, nécessite donc de renoncer à ses usages métaphoriques, et sollicite immanquablement les différents champs disciplinaires qui la prennent pour objet.
Aussi, la distinction qu’il convient aujourd’hui d’opérer n’est pas tant celle établie par Pierre Nora en 1984 entre mémoire et histoire pour souligner leur opposition[25], que celle entre l’usage commun largement métaphorisé du terme mémoire, inscrit dans une nouvelle configuration langagière qui tend à l’essentialiser, voire la sacraliser, dans l’espace public, et son acception scientifique qui lui restitue sa polysémie, sans pour autant la déconsidérer. Ainsi sortirions-nous d’une aporie qui prédestinerait la « mémoire » à être l’ennemi de l’historien.

La familiarité de l’expression devoir de mémoire a pour effet de la situer dans une sorte d’apesanteur temporelle qu’il est nécessaire de déconstruire par l’opération historiographique. Ce travail s’inscrit bien, en cela, dans une histoire du temps présent qui cherche à se soustraire à l’achronie contemporaine. Historiciser le devoir de mémoire conduit à établir donc d’abord et avant tout une chronologie de ses usages, aussi précise que possible. Or ce travail se heurte à des lectures rétroactives faites depuis plusieurs années. Ainsi Olivier Lalieu, alors engagé dans un travail de thèse d’histoire sur les associations d’anciens déportés, publie en 2001 un article au titre programmatique : « L’invention du devoir de mémoire[26] ». L’auteur propose une genèse de la notion de devoir de mémoire dans l’immédiat après-guerre, au sein des associations d’anciens déportés. Pourtant, la première occurrence de l’expression qu’il peut donner est beaucoup plus tardive, puisqu’elle date de 1986. Cette tentative de projeter la notion dans le passé s’explique par le désir de rendre celle-ci intelligible à la lumière du contemporain[27]. Elle n’en est pas moins trompeuse.
Le fait que le terme devoir de mémoire n’ait jamais fait l’objet d’une recherche historique a permis la circulation d’un certain nombre de présupposés le concernant. Nous pouvons même constater, à partir du milieu des années 1990, la constitution d’un véritable récit du « devoir de mémoire », toujours à l’œuvre aujourd’hui, qui associe la genèse de l’expression au souvenir de la déportation et de l’extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, la rattachant régulièrement à la figure de Primo Levi. Ce récit s’est d’autant plus enraciné dans l’espace public qu’il a été non seulement produit par les discours d’autorité des champs médiatiques et politiques, mais également été validé par de nombreux historiens. Entre autres exemples, et en s’appuyant sur l’article précité d’Olivier Lalieu, Olivier Wieviorka peut récemment écrire dans un livre que « le devoir de mémoire ne constitue […] qu’une injonction relativement récente. Le terme même date de 1995 et reprend le titre français de la publication posthume d’un entretien que Primo Levi avait accordé en 1983 à deux historiens italiens[28] ». Or, les premières occurrences de l’expression retrouvées dans les années 1970, renvoient à toute autre chose. À titre d’exemple, nous mentionnerons un article du philosophe libéral Philippe Némo, publié dans la revue Commentaire en 1980, et dont le titre est « Le devoir de mémoire »[29]. Fondée par Raymond Aron deux ans auparavant, la jeune revue est alors centrée sur la critique des régimes communistes. C’est dans ce cadre conceptuel que le titre de l’article de Philippe Némo prend place, ce dernier constatant avec satisfaction la faillite du communisme et soulignant l’importance de garder dorénavant en mémoire l’héritage des anciens.



Ces lectures rétroactives obligent à clarifier un point de la recherche : quid de l’articulation entre la locution devoir de mémoire et la notion qu’il est susceptible recouvrir ? L’idée que les hommes auraient à se souvenir d’événements signifiants du passé et/ou de leurs morts n’a-t-elle pas précédé la formule ? Le Zakhor biblique, par exemple, ne correspond-il pas à un devoir de mémoire avant la lettre[30] ? Si l’on se tourne vers l’anthropologie religieuse, nous pourrions considérer que les actes rituels constituent des devoirs de mémoire pour des événements perçus comme fondateurs. De même, à propos de l’idée souvent associée à l’usage du devoir de mémoire, selon laquelle il faut se souvenir de tel ou tel fait pour en tirer des leçons dans le présent et l’avenir, nous pourrions également émettre l’hypothèse que les exempla de la littérature gréco-latine de l’Antiquité, puis chrétienne du Moyen Âge occupaient la fonction de notre devoir de mémoire contemporain. Par conséquent, si l’on historicise la notion, on est rapidement conduit à la considérer comme transhistorique. D’un point de vue anthropologique, la nécessité du souvenir, quelle que soit sa trace, nous ramène en effet à la condition de l’homme[31].
Afin d’éviter tout anachronisme, il parait nécessaire de s’en tenir à l’expression, c’est-à-dire à sa construction et à ses usages dans le cadre temporel, des années 1970 aux années 2000, qui a déterminé les potentialités de sa formulation. L’intention est de soumettre ce cadre temporel à l’analyse d’événements et de conjonctures qui, par le truchement des emboîtements d’échelles, paraît seule susceptible de rendre intelligible l’histoire du devoir de mémoire.
Par exemple, la cristallisation de la formule dans l’espace public en 1992 invite à relier des événements divers survenus cette année-là : non-lieu de Touvier en avril, présence chahutée de François Mitterrand lors de la commémoration du Vel’ d’Hiv’ en juillet, polémique autour du dépôt de gerbe présidentiel sur la tombe de Pétain en octobre-novembre, inauguration du Centre d’histoire de la Résistance et de la Déportation à Lyon en octobre, proposition d’une loi par le député Jean Le Garrec pour instaurer une journée de commémoration nationale du Vel’ d’Hiv’ en octobre, choix du sujet du baccalauréat de philosophie pour la session de juin 1993. Il semble nécessaire de rattacher ces faits à des conjonctures spatiales et temporelles plus larges : place du Front national sur la scène politique française à partir de 1983 ; travail d’acteurs comme Serge Klarsfeld, Michel Noir, Jean-Marie Cavada et Pierre Truche au cours des années 1980-1990 ; arrivée de la « génération charnière » (née entre 1930 et 1950) à des postes de responsabilité dans les milieux politique, intellectuel et médiatique au cours des années 1980 ; notion de scandale mémoriel (attentat de Copernic en 1980, carmel d’Auschwitz en 1986, profanation du cimetière juif de Carpentras en 1990) ; réfutation des thèses négationnistes à partir de 1978 avec, en particulier, le vote de la loi Gayssot en 1990 ; discours sur l’oubli comme nouvelle pathologie sociale au tournant des années 1980-1990 ; reconnaissance et prise en charge du stress post-traumatique à partir de 1980 ; reconnaissance des juifs comme communauté mémorielle au cours des années 1980 ; perception du génocide juif comme trauma occidental dans les années 1980-1990 ; harmonisation du droit pénal international pour les crimes imprescriptibles ; création de dispositifs internationaux de pacification du passé avec la multiplication des commissions « Vérité et réconciliation » dans les années 1990, etc.
La dimension itérative de la locution devoir de mémoire dans notre société a eu un autre effet qu’il faut prendre en compte dans un travail d’historicisation. Il convient de se départir d’une vision téléologique qui prendrait le succès de l’expression pour une évidence partagée, en introduisant de la contingence, en postulant que ce néologisme devoir de mémoire aurait pu ne pas exister, ou suivre un autre chemin que celui qu’il s’agit de retracer, au croisement d’itinéraires possibles. Ce n’est que dans cette « défatalisation » de l’histoire de la notion que l’on peut véritablement analyser les différents facteurs, les chaînes causales, expliquant son adoption tant dans le langage officiel que dans des usages ordinaires.
Situer l’expression devoir de mémoire dans une contingence historique s’avère d’autant plus nécessaire que le mot d’ordre qu’il recouvre — « devoir de » – a été présentée dans le même temps comme une évidence morale. Le choix du sujet du baccalauréat de philosophie en 1993, « Pourquoi y a-t-il un devoir de mémoire ? », constitue un bon repère chronologique de ce processus d’« évidenciation » normative du terme. Cette évidence implique plus généralement de considérer la « mémoire » comme nouvelle vertu sociale de notre « condition postmoderne » marquée par la fin des grands récits[32]. Cette acception s’est élaborée au gré d’un glissement sémantique, comme nous l’avons souligné précédemment, qui pourrait être comparé à celui qu’avait connu juste auparavant le terme de « patrimoine »[33]. Ce glissement opéré au cours des années 1970-1980 explique en partie le succès du néologisme devoir de mémoire. En effet, si l’adhésion au devoir de mémoire a pu s’opérer, c’est bien parce que la mémoire emportait avec elle une métaphore suffisamment valorisée pour qu’elle puisse prendre place dans une locution injonctive, par définition contraignante.


L’intention d’une telle recherche sur le devoir de mémoire ne vise pas à évaluer l’efficience de l’injonction impliquée. Énoncé performatif, cette injonction s’accompagne le plus souvent en effet d’un projet de consolidation du lien social : baisse du racisme ou de l’antisémitisme, du négationnisme, renforcement du lien démocratique, du vivre-ensemble, de l’unité nationale, restauration de l’estime d’un groupe, de soi, à travers des dispositifs de réparation et/ou de pacification, etc. Les vertus « thérapeutiques », qu’elles soient individuelles et/ou collectives, prêtées au devoir de mémoire, n’ont pas manqué depuis vingt ans. Il ne s’agit pas ici d’établir un diagnostic sur la réalité de ces vertus. À l’instar des recherches sur la construction de néologismes arrimés à des politiques publiques (Bernard Lahire avec « l’illettrisme », Florian Charvolin avec « l’environnement »[34]), ou sur la création de dispositifs institutionnels censés favoriser le lien social (Sandrine Lefranc avec les commissions « Vérité et Réconciliation », Didier Fassin et Richard Rechtman avec la prise en charge du stress post-traumatique[35]), ce travail d’historicisation se borne à scruter la mobilisation d’un néologisme entendu comme une invention sociale, sans chercher à mesurer son efficience.
L’expression devoir de mémoire s’élabore, depuis les années 1970, dans et par ses évolutions. Aussi, et parallèlement à cette élaboration, la chronologie des mobilisations mémorielles autour d’événements comme le génocide des Juifs, le régime de Vichy, la Résistance, la guerre d’Algérie, la colonisation, l’esclavage, etc., n’ apparaît pas pouvoir s’analyser par des concepts psychanalytiques utilisés dans un sens métaphorique par certains historiens, selon un schéma narratif de type « refoulement/dévoilement/obsession »[36]. Cette grille d’analyse qui s’est largement diffusée (médias, école) a renforcé le processus d’essentialisation et d’évidenciation des mémoires de certains événements. Venant déconstruire cette lecture, l’analyse de l’irruption du devoir de mémoire dans le discours social permet de comprendre comment les stratégies et négociations d’acteurs, imbriquées dans de nouveaux cadres sociaux, interviennent dans la désignation de différents faits historiques considérés comme mémorables pour la société, au détriment d’autres faits. De la même façon, cette articulation fonctionne dans l’évolution du regard jeté sur les mêmes faits historiques. La montée du primat compassionnel et des traumas de l’histoire dans notre société a, par exemple, donné lieu à une relecture de la Première Guerre mondiale dans l’espace public à partir du début des années 1990, centrée sur la souffrance des Poilus et les atrocités des combats.
Ce ne sont pas les « mémoires » d’événements historiques qui s’imposent à nous par un dévoilement progressif et inéluctable. Les traces de ces événements se trouvent mobilisées par divers acteurs, en interaction avec des événements contemporains et de nouveaux cadres sociaux dans lesquels l’évolution de notre conception du temps (passé-présent-avenir) occupe également une place prépondérante. Comme l’avait remarqué François Hartog, le « devoir de mémoire » renvoie en effet à un nouveau régime d’historicité dans lequel nous nous trouverions depuis les années 1970[37]. L’expression apparaît comme un indicateur, parmi d’autres, de notre nouvelle présence au monde en lien avec son passé et son avenir. Une présence dilatée dans une société de l’innovation et non plus de la tradition, caractérisée par une intention patrimoniale qui a la particularité de produire une « filiation inversée »[38].
Il ne paraît pas inutile de revenir, à cet effet, sur l’une des toutes premières occurrences de l’expression, retrouvée en 1980, précédemment citée. Le titre de l’article de Philippe Némo dans la revue Commentaire s’inscrit bien dans une appréhension du temps désormais débarrassée de l’horizon d’attente dont relevait l’idéologie marxiste, comme, avant elle, le projet des Lumières[39]. Même si son fondement idéologique apparaît différent, la perception contemporaine d’une rupture de la temporalité, avec un passé désormais disjoint, appréhendé comme patrimoine à inventorier, est encore plus précisément mise en œuvre au même moment par l’entreprise éditoriale et scientifique de Pierre Nora. Le projet des Lieux de mémoire qui prend forme à son séminaire de l’ehess à partir de 1977 répond ici au sentiment d’une disparition rapide de la mémoire nationale[40], autant qu’à celui d’une « crise de l’avenir »[41]. Ce regard posé sur notre présent ne se limite pas à une élite intellectuelle. L’enquête que mène l’anthropologue Françoise Zonabend entre 1968 et 1975 dans le village de Minot, en Bourgogne, se fait l’écho d’un sentiment analogue partagé par des habitants pour lesquels « le monde où l’on a vécu, que nos aïeuls ont connu, bascule vers un monde que nous avons perdu[42] ». Les usages du devoir de mémoire viendront s’intégrer dans cette conjoncture, en formalisant par là même ce « malaise dans la temporalité » qui affecterait notre manière de nous penser.


Faire une histoire du devoir de mémoire, ce n’est pas faire l’histoire de la mémoire d’un événement, d’un lieu, d’un groupe, etc. Si l’on reprend la définition qu’en donnait l’historien Henry Rousso en 1987, il s’agit d’étudier l’évolution des « différentes pratiques sociales, de leur forme et de leur contenu, ayant pour objet ou pour effet, explicitement ou non, la représentation du passé et l’entretien de son souvenir, soit au sein d’un groupe donné, soit au sein de la société tout entière[43] ».
Il s’agit donc de retracer aussi l’histoire d’une notion imbriquée dans un fait social nommé communément « phénomène mémoriel », et situé habituellement dans les années 1970 à nos jours. Cette recherche relève donc d’une étude de cas propre à mieux cerner l’histoire de ce phénomène, et plus particulièrement en France, tout en rappelant qu’une évolution analogue est attestée dans bien d’autres régions du monde[44].
La circulation de l’expression dans le champ politique a été encouragée tant par le pouvoir exécutif que par le pouvoir législatif. Dans le cadre du bilan de ses deux mandats, le président de la République Jacques Chirac avait été dénommé en mars 2007, par Le Monde, « Le Président du devoir de mémoire ». Le journal venait consacrer ainsi un usage continu de l’expression par Jacques Chirac entre 1995 et 2007. Par ailleurs, elle a été systématiquement employée à partir de 1999 par les parlementaires, de droite comme de gauche, à l’occasion des débats concernant les lois relatives au passé de la France : reconnaissance du terme « guerre » d’Algérie en 1999, reconnaissance des crimes racistes et antisémites de l’État français et hommage aux Justes en 2000, reconnaissance de la traite et de l’esclavage comme crime contre l’humanité en 2001, reconnaissance de la nation en faveur des Français rapatriés en 2005. L’analyse de cette pratique oratoire, dans laquelle le devoir de mémoire vient incarner une véritable geste nationale entre 1995 et 2005, conduit à étudier par ailleurs les politiques de mémoire instaurées comme de véritables politiques publiques de l’État français. Le devoir de mémoire ne peut se réduire à un gadget de communication politique vis-à-vis d’électeurs perçus comme de plus en plus sensibles à ces questions de mémoire. Il constitue un élément important dans les négociations et les stratégies de différents acteurs (responsables des pouvoirs exécutif et législatif, élus locaux, hauts fonctionnaires, entrepreneurs de mémoire, historiens) et dans les arbitrages inhérents aux politiques publiques de la mémoire[45].
Dans le même temps, et dans la mesure où la formule devoir de mémoire recèle sui generis une dimension normative utilisée comme un outil de gouvernance et de régulation sociale par les pouvoirs publics, il convient de distinguer l’action politico-normative destinée à agir sur les individus pour constituer une mémoire commune de son impact réel sur les mémoires individuelles[46]. Autant il est possible de retracer l’évolution des discours et des actions qui, au nom du devoir de mémoire, souhaitent imprimer dans les consciences individuelles tel ou tel fait historique, définissant ainsi ce qui, pour l’État ou pour les médias, doit être mémorisable par le corps social, autant il est beaucoup plus difficile d’en saisir la réception, et surtout l’appropriation réelle dans la mémoire de chacun.
En revanche, établir une histoire du devoir de mémoire conduit à historiciser l’articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective dans un contexte de transformations des modes de transmission du passé. Quels sont les impacts des nouveaux outils de diffusion (télévision, mémoriaux, procès, livres, école, Internet) sur la médiation de la mémoire individuelle ? Inversement, de quelle manière ces nouveaux instruments ont-ils modifié la construction des grands récits collectifs ? Cette question de l’historicisation de l’articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective nous invite à recontextualiser celle-ci dans un ensemble d’évolutions plus larges qui sont venues la modifier. La massification et l’« horizontalisation » de nouveaux outils de transmission de la mémoire (télévision, Internet), ainsi que l’émergence de nouveaux paradigmes sociaux (la mise en récit public de souvenirs intimes, la prise en charge du trauma par son dévoilement médiatique, l’affirmation et la demande de reconnaissance de nouvelles identités individuelles et collectives, la redéfinition du contrat moral de l’État entre lui et ses administrés, etc.) ont redessiné les rapports entre mémoire individuelle et mémoire collective.



Le succès de l’expression devoir de mémoire, figure de style proprement nationale, doit être placé dans le contexte des changements survenus à l’échelle planétaire. Une telle formule s’est en effet inscrite, au fur et à mesure de ses usages, au carrefour de nouveaux idéaux sociaux puissamment évocateurs et mobilisateurs comme le patrimoine, la réalisation de soi, les luttes pour la reconnaissance des particularismes ou la raison humanitaire[47]. Ces nouveaux paradigmes, portés par de nouveaux outils technologiques mondialisant notre univers individuel, ont redéfini les catégories de compréhension des devoirs des États comme ceux des individus à l’égard du présent comme du passé.
La tâche de l’historien qui souhaite écrire une histoire du devoir de mémoire peut contredire le principe d’une écriture historienne qui « exorcise et avoue une présence de la mort au milieu des vivants[48] ». Il se retrouve en effet davantage confronté aux traces innombrables et multiformes qui illustrent la contraction d’une dette des contemporains à l’égard des morts. Son travail ne consiste plus alors à faire entendre les voix oubliées du passé, mais à inscrire le devoir de mémoire dans un ordre du discours qu’il convient de décortiquer par son historicisation.

Sébastien Ledoux.
Sébastien Ledoux termine actuellement une thèse sur « L’histoire du “devoir de mémoireˮˮ » à Paris 1 (Centre d’histoire sociale du XXe siècle). Il a déjà publié Le « devoir de mémoire » à l’école. Essai d’écriture d’un nouveau roman national, Sarrebruck, Études universitaires européennes, 2011, et de nombreux articles sur le sujet. Références bibliographiques de l’auteur : http://histoire-sociale.univ-paris1.fr/spip.php?article265



[2] L’expression « devoir de mémoire » entre dans le dictionnaire Larousse en 2003 avec pour définition : « L’obligation morale de témoigner, individuellement ou collectivement, d’événements dont la connaissance et la transmission sont jugées nécessaires pour tirer les leçons du passé (la Résistance ou la déportation pendant la Seconde Guerre mondiale par exemple). »
[3] Henry Rousso et Éric Conan, Vichy, un passé qui ne passe pas, rééd., Paris, Seuil, coll.  « Points », 1996, p. 396.
[4] Entretien d’Annette Wieviorka sur le site Rue 89, le 1er janvier 2009. www.rue89.com/2009/01/01/annette-wieviorka-au-cambodge-on-attend-trop-de-la-justice.
[5] L’association, présidée à l’origine par René Rémond et actuellement par Pierre Nora, réunit dans son conseil d’administration des historiens tels que Jean-Pierre Azéma, Jean-Jacques Becker, Jean-Noël Jeanneney, Mona Ozouf, Krzysztof Pomian, Maurice Vaïsse et Michel Winock.
[6] Voir Paul Ricœur, La Mémoire, l’Histoire, l’Oubli, rééd., Paris, Seuil,  « Points essais », 2003, p. 106.
[7] Antoine Prost, Douze Leçons sur l’histoire, rééd., Paris, Seuil, « Points histoire », 2007, p. 306.
[8] Depuis l’article de Pierre Nora, « La mémoire collective », dans Jacques Le Goff (dir.), La Nouvelle Histoire, Retz-CEPL, 1978, pp. 398-401.
[9] M-C Lavabre, «Usages et mésusages de la notion de mémoire», Critique internationale n°7, 2000, p. 50.
[10] Voir Olivier Dumoulin, Le Rôle social de l’historien. De la chaire au prétoire, Albin Michel, 2003.
[11] La sociologue considérait à cet égard que « les historiens de la mémoire ne peuvent ni échapper à la nécessité de justifier leur objet, ni éviter de s’interroger, au second degré, sur la signification même du mouvement qu’ils ont suscité, accompagné, épousé », M-C Lavabre, « Usages du passé, usages de la mémoire », Revue française de science politique (3), 1994, p. 481.
[12] Jacques Revel, Un Parcours critique. Douze exercices d’histoire sociale, Paris, Éditions Gaalade, 2006, p. 12.
[13] Michel de Certeau, « Faire de l’histoire. Problèmes de méthodes et problèmes de sens », Recherche de sciences religieuses, n°58, 1970, p. 510.
[14] Voir le point de vue récent de Philippe Joutard sur cette défiance des historiens à l’égard de la mémoire : « La mémoire collective », dans Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia et Nicolas Offenstadt (dir.), Historiographies II, Gallimard, 2010, pp. 779-791.
[15] Voir M-C Lavabre, « Usages et mésusages de la notion de mémoire », Critique internationale, n° 7, 2000, p. 48, et pour l’analyse d’une évolution analogue dans les pays anglo-saxons : Kerween Lee Klein, « On the Emergence of Memory in Historical Discourse », Representations, n° 69, 2000, pp. 127-150.
[16] Notion développée par l’historien allemand Reinhart Koselleck pour qui « tout homme, toute communauté humaine dispose d’un espace d’expérience vécue, à partir duquel on agit, dans lequel ce qui est passé est présent ou remémoré, et des horizons d’attente, en fonction desquels on agit », Reinhart Koselleck, « Temps et histoire », Romantisme (56), 1987, p. 9.
[17] P. Nora, « L’ère de la commémoration », dans P. Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, rééd., t. 3, Les France, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 1997, p. 4710.
[18] Josiane Boutet, Le Pouvoir des mots, Paris, La Dispute, 2010, p. 16
[19] M. Foucault, L’Archéologie du savoir, rééd., Paris, Gallimard, coll. « Tel », 2012 [1969], p. 148.
[20] La formule « lieu de mémoire » apparaît cependant déjà en 1978, a priori pour la première fois, sous la plume de Pierre Nora, à l’occasion d’un entretien que l’historien accorde à la revue Les Nouvelles littéraires, n° 2620, février 1978, p. 17.
[21] Voir les travaux de synthèse des Memory Studies récemment publiés : Astrid Erll et Ansgar Nünning (sous la dir. de), A Companion to Cultural Memory Studies, Berlin, De Gruyter, 2010 ; et Jeffrey K. Olick, Vered Vinitzky-Seroussi et Daniel Levy (sous la dir. de), The Collective Memory Reader, Oxford, Oxford University Press, 2011.
[22] Citons de l’auteur Les Cadres sociaux de la mémoire, rééd., Paris, Albin Michel, 1994 [1925], La Mémoire collective, rééd., Paris, Albin Michel, 1997 [1950], et La Topographie légendaire des Evangiles en terre sainte. Étude de mémoire collective, rééd., Paris, PUF, 2008 [1941].
[23] M-C Lavabre, « Paradigmes de la mémoire », Transcontinentales, n°5, 2e semestre 2007, p. 147.
[24] Roger Bastide, « Mémoire collective et sociologie du bricolage », L’Année sociologique, n°3, 1970, p. 83.
[25] « Mémoire, histoire : loin d’être synonymes, nous prenons conscience que tout les oppose », P. Nora, « Entre mémoire et histoire. La problématique des lieux », dans Les Lieux de mémoire, t. I, La République [1984], Gallimard, rééd. « Quarto », 1997, p. 24.
[26] Olivier Lalieu, « L’invention du devoir de mémoire », Vingtième Siècle, n°69, 2001, pp. 83-94.
[27] Voir François Dosse, « Le moment Ricœur de l’opération historiographique », Vingtième Siècle, n° 69, janvier-mars 2001, p. 139.
[28] Olivier Wieviorka, La Mémoire désunie. Le souvenir politique des années sombres, de la Libération à nos jours, Paris, Seuil, 2010, p. 254.
[29] Précisons que la formule apparaît uniquement dans le titre, et non dans le corps du texte : Philippe Némo, « Le devoir de mémoire », Commentaire (3), n° 11, automne 1980, pp. 392-400.
[30] Ce « Souviens-toi ! », répété à plusieurs reprises dans l’Ancien Testament, constitue un devoir que Dieu adresse au peuple d’Israël pour lui rappeler d’où il vient et à quel destin il est promis.
[31] Ainsi, pour Bernard Stiegler, l’« externalisation » de la mémoire est une capacité qui distingue l’être humain des autres espèces : La Technique et le Temps, t. II, La Désorientation, Galilée, 1996.
[32] Jean-François Lyotard, La Condition postmoderne [1979], rééd. Paris, Minuit, 2010.
[33] Voir à ce sujet le texte inaugural d’André Chastel et de Jean-Pierre Babelon publié dans la Revue de l’art en 1980, « La notion de patrimoine », réédité depuis dans La Notion de patrimoine, rééd., Paris, Liana Lévi, 2000.
[34] Bernard Lahire, L’Invention de l’« illettrisme », rééd., Paris, La Découverte, 2005 ; Florian Charvolin, L’Invention de l’environnement en France, Paris, La Découverte, 2003.
[35] Sandrine Lefranc, Politiques du pardon, Paris, puf, 2002 ; Didier Fassin et Richard Rechtman, L’Empire du traumatisme. Enquête sur la condition de victime, Paris, Flammarion, 2007.
[36] Voir, entre autres, Henry Rousso, Le Syndrome de Vichy, de 1944 à nos jours, rééd., Paris, Seuil,  « Points Histoire », 1990 ; Benjamin Stora, La Gangrène et l’Oubli. La Mémoire de la guerre d’Algérie [1992], rééd., Paris, La Découverte, 2005 ; Pascal Blanchard, Nicolas Bancel et Sandrine Lemaire (sous la dir. de), La Fracture coloniale. La société française au prisme de l’héritage colonial, rééd., Paris, La Découverte, 2006.
[37] François Hartog, Des régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, 2002, p. 215-216.
[38] Jean Davallon, « Le patrimoine : une filiation inversée ? », Espace-temps, n° 74-75, 4e trimestre 2000, pp. 6-16.
[39] Voir Frédéric Rouvillois, L’Invention du progrès. 1680-1730, Paris, cnrs Éditions, 2011.
[40]  Voir Les Lieux de mémoire, op. cit., vol. 1, p. 15.
[41] Titre de l’article de Krzyzstof Pomian, paru dans les premiers mois de la revue Le Débat fondée par Pierre Nora : « La crise de l’avenir », Le Débat, n° 7, décembre 1980, pp. 5-17.
[42] Françoise Zonabend, La Mémoire longue [1980], Jean-Michel Place, rééd. 2000, p. 9.
[43] H. Rousso, Le Syndrome de Vichy, op. cit., p. 11.
[44] Voir Henry Rousso, « Vers une mondialisation de la mémoire », Vingtième Siècle, dossier « Mémoires Europe-Asie », n° 94, avril-juin 2007, pp. 3-10.
[45] Sur les politiques publiques de la mémoire, voir l’exemple des Justes étudié par Sarah Gensburger, Les Justes de France. Politiques publiques de la mémoire, Paris, Presses de Sciences Po, 2010.
[46] Voir M-C Lavabre, « Peut-on agir sur la mémoire ? », dans Yves Léonard (dir.), « La mémoire, entre histoire et politique », Les Cahiers français, n° 303, juillet-août 2001.
[47] Voir Didier Fassin, La Raison humanitaire. Une histoire morale du temps présent, Paris, Gallimard et Seuil, 2010.
[48] Michel de Certeau, L’Écriture de l’histoire, rééd., Paris, Gallimard, « Folio histoire », 2002, p. 122.

1 commentaire: